Dangereusement Vôtre fête ses 30 ans, et il a du mal à sortir de la catégorie des moins bons Bond. Pourtant, la dernière aventure de Roger Moore dans le rôle de James Bond regorge de qualité, de bonnes idées et de scènes très réussies. 30 ans après, replongeons nous dans les bons côtés du 14 eme Bond. (voir la première partie)
Cocorico !
Il faut bien qu’on en parle à un moment : Dangereusement Vôtre est sans doute le plus francophile des James Bond. En effet, deux longues séquences se passent sur le sol français et mettent à l’honneur le patrimoine national, sans oublier la discussion entre Zorin et le KGB sur hippodrome de Chantilly. On voit l’assassinat extraordinaire de Tibbett dans une de nos stations-services. Le luxe est associé aux restaurants français et à la vie de Château aristocrate. Les publicités pour Michelin sont dans tous les plans, et Bond montre, après la course en 2CV, qu’une voiture française comme la Renault 11 est tout à fait adaptée à l’action.
Même s’ils ne sont pas toujours convaincants les personnages typiques du cinéma français font des caméos amusants dans le film : On a un simili Hercule Poireau / Achille Aubergine (LOL pourrait-on s’écrier) qui se fait tuer rapidement, un policier français comique typique dans une scène supprimée, et un sous-fifre franco-belge (Patrick Bauchau alias Scarpine) assez glaçant.
Ce décor français semble tout à fait convenir au Bond de Roger Moore qui y semble comme un coq en pâte.
Un duo de choc
Un des meilleurs alliés de la période Moore est sans conteste Sir Godfrey Tibbett. Les deux acteurs étant vieillissants, on ne peut pas vraiment parler d’un duo de choc, mais il y a une excellente alchimie entre eux, pleine de classe, d’astuce et d’intelligence.
Roger Moore et Patrick Macnee dans une même aventure, c’est comme si Amicalement Vôtre rencontrait Chapeau Melon et Bottes de Cuir. D’ailleurs, l’aventure avec les deux agents rappelle beaucoup le duo de Brett Sinclair et Dany Wilde sur le petit écran : l’ambiance est décontractée sans vraiment de menaces et fait plaisir à voir, jusqu’au destin tragique de Tibbett et la réaction pleine de rage de 007 face à Zorin.
On regretterait presque que cette rencontre ne se soit pas produite quelques années plus tôt.
Cliquez ici pour lire notre hommage à Sir Patrick Macnee et l’héritage des séries TV dans Dangereusement Vôtre.
Des mises à mort chaudes
Si le destin de Tibbett est tragique, les mises à morts réservées à Bond sont vraiment dignes de Fleming. 007 n’avait pas eu le droit à de tels supplices depuis Moonraker et l’ère Connery, et on peut remercier Zorin pour son inventivité !
Noyer Bond dans sa Roll Royce, le brûler vif dans une cage d’ascenseur, ce n’est pas aussi efficace qu’une balle dans le cœur, mais ça donne des situations intéressantes : forcer 007 à respirer l’air des pneus, ou survivre dans une cage d’ascenseur enflammée, qui plus est avec Stacey Sutton, voilà qui donne des moments tendus superbement accompagnés par la musique de John Barry.
Le final dans la mine a également un petit air de Titanic accompagné d’un 007 pourchassé par une May Day en furie. Bond est peut-être vieillissant, mais les situations dans lesquelles il se retrouve ne baissent pas en intensité. Bien au contraire !
De l’espionnage et du contre-espionnage
Les Bond de Roger Moore nous ont habitués aux grands méchants faisant face à Bond. Avec Dangereusement Vôtre, on revient à des intrigues d’espionnage intéressantes : Bond doit faire face à toute un contingent de l’armée soviétique en Sibérie.
Plus tard dans le film, le méchant a un double jeu avec le KGB intéressant, qui permet de voir le Général Gogol face à plus fort que lui et des mises à mort d’espions soviétiques vraiment cruelles. Bond de nouveau mis face à face à une espionne soviétique, ça ne vaut pas l’agent Triple X, mais ça ramène un peu de guerre froide dans cette histoire américaine.
Un couple de méchant parfait
Après plusieurs films aux méchants ennuyeux, Dangereusement Vôtre revient aux méchants fous. On a pour l’occasion le méchant le plus jeune de la franchise et le premier oscarisés en la personne de Christopher Walken, et l’homme de main le plus improbable avec une Grace Jones au top de sa forme et aux costumes extravagants.
Dommage qu’il n’y ait pas beaucoup d’alchimie entre eux et Bond, car du côté des méchants, ils donnent de leur mieux ! Zorin est un parfait psychopathe capable de passer du dédain au rire en un clin d’œil, et du rire à la stupéfaction en encore moins de temps. Entre homme d’affaire génial, et mégalomane dérangé, il aurait pu être un méchant à la hauteur de Silva, si le script lui en avait laissé l’occasion. Le duo qu’il forme avec May Day est à la fois extrêmement efficace, mais aussi dérangeant quand on voit leur séance d’entrainement.
Le personnage de May Day est aussi intéressant, même si elle n’a pas vraiment de rivale à l’écran. Elle ne ressemble à aucune autre méchante et impose le respect. Son retournement à la fin, en un minimum de dialogues, n’en est que plus plaisant. Dommage que ce génial couple de méchant n’ai pas pu se hisser à la hauteur d’un duo Blofeld/Bunt ou Trevelyan/Onatopp. Peut-être si une autre Pop Star avait été choisie pour le rôle de Zorin, on aurait eu le meilleur couple de méchant de toute la franchise. Dommage qu’un certain David Bowie ait refusé le rôle.
Bond : journaliste et cowboy
Arrivons enfin à Bond ! Si l’espion qu’on aimait est un peu aux abonnés absents, le héros de Dangereusement Vôtre n’est pas inintéressant : il se rapproche un peu d’un Lord Brett Sinclair espion tout à fait à l’aise dans les cocktails parties. Quand il arrive en Amérique, Bond troque le smoking pour des tenues plus eighties, et fait penser à ces héros de journalistes américains qui se trouvent dans des situations qui les dépassent face au grand capital. Et quand il défend la propriété de Stacey Sutton à coup de fusil, on n’est pas loin du western, même si on se souviendra surtout de cette séquence pour la recette de la quiche bondienne.
Moore… Roger Moore
C’est sans doute le James Bond vieillissant qui impacte le plus la crédibilité du film. Mais est-ce vraiment la faute de Roger Moore ? L’acteur n’avait pas fait mystère, après Rien que pour vos Yeux, qu’il souhaitait passer la main pour le rôle. Faute de candidat sérieux, il a été forcé de venir à la rescousse de la franchise dans Octopussy, effectuer un face à face avec nul autre que Sean Connery pour la guerre des Bond (affrontement remporté par Moore), et finalement revenir à 57 ans dans le costume de Bond.
Il aurait pu s’ennuyer aussi visiblement que Sean Connery dans les Diamants sont éternels. Et pourtant, Moore y met toujours autant de bonne volonté, a visiblement du plaisir à être sur le plateau malgré des Girls qui ont la moitié de son âge. Il fallait du courage pour revenir jouer les play-boys avec le sourire, quand on a face à soit une Grace Jones explosive qui l’écrase au lit.
Regardez les cascades que l’on fait faire à Bond ! Les doublures sont parfois bien visibles, mais chaque fois qu’il est face à la caméra, Roger Moore donne le meilleur de lui-même pour être crédible dans les situations.
On loue souvent la performance de Timothy Dalton pour son Bond sombre, Daniel Craig pour son investissement, et Sean Connery pour son charisme. Mais au final, Roger Moore qui joue, malgré l’âge et le temps qui passe, son Bond détendu et charmeur, n’est-ce pas là la meilleure des prouesses ?
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