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Michael Kamen, un adieu aux armes… fatal !

Retour sur la surprenante bande son d’un James Bond pas comme les autres.

Juin 1989. Cinq mois avant la chute du mur de Berlin, sort dans les salles londoniennes le film « Permis de tuer » (Licence to kill) réalisé par John Glen avec Timothy Dalton dans le rôle de James Bond.
Pour la musique, le compositeur historique de la saga, John Barry, doit se remettre d’une opération chirurgicale après une rupture de l’oesophage. Il est impossible pour lui de se rendre à Londres pour les besoins de la production du film. Les producteurs doivent alors lui trouver un remplaçant.

Un peu de contexte, nous sommes à la fin des années 80. Le cinéma n’est plus celui des « sixties ». Certains réalisateurs vont modifier considérablement le cinéma d’action avec des propositions fortes et innovantes. C’est le cas notamment de Richard Donner qui, avec sa saga « l’Arme fatale » (Lethal Weapon) va donner ses lettres de noblesses au genre du Buddy movie. En 1988 sort également un autre film qui fera date dans l’histoire du cinéma d’action, « Die Hard » de John McTiernan.
Le lien entre ces deux films ? Leur compositeur, Michael Kamen.

Né à New York en 1948, Michael Arnold Kamen, souhaitant devenir musicien, va orienter une partie de son début de carrière vers la musique pop. Après des études au célèbre conservatoire Julliard School de Manhattan, Kamen va se construire une solide réputation d’arrangeur. On compte notamment à son actif les arrangements orchestraux sur certains morceaux de l’album The Wall de Pink Floyd. Le travail de Michael Kamen au cinéma va débuter avec « The Next Man » de Richard Sarafian. Puis, les films « Dead Zone » de Cronenberg et « Brazil » de Terry Gilliam lui apportent la reconnaissance des critiques.

Pour l’anectode, Kamen a composé la bande originale de la série « Edge of Darkness » réalisée par un certain Martin Campbell. Le même Martin Campbell qui réalisera quelques années plus tard « GoldenEye » et « Casino Royale ».
Bien évidement, ce sont les cartons stratosphériques de l’« Arme Fatale » et de « Die Hard » qui vont consacrer Kamen comme grand compositeur de films d’action.

C’est sans doute pour cette raison que les producteurs et le réalisateur John Glen se sont tournés vers lui pour remplacer John Barry. Selon John Glen, son choix de prendre Kamen se justifierait par le fait que son style était le plus proche de celui de Barry.

Mais est-ce vraiment le cas ?

À y regarder de plus près, le travail de Michael Kamen sur « Permis de tuer » est assez éloigné du style habituel de la saga. Ceci s’explique certainement par le fait que « Permis de tuer » ne ressemble pas du tout aux autres films Bond.

L’atmosphère du film et ses thématiques le rapprochent d’avantage de la série « Deux flics à Miami » que du thriller d’espionnage de « Bons baisers de Russie ».
La musique de Michael Kamen s’en ressent bien entendu. Et on pourrait même dire que le compositeur s’est peut être un peu trop reposé sur ses acquis.
Produit à la jonction des années 80 et 90, « Permis de tuer » propose une atmosphère bien plus sombre que celle de son prédécesseur, « Tuer n’est pas jouer ». La mode de l’époque au cinéma est de s’éloigner de l’ambiance relativement légère des années 80 pour proposer des oeuvres plus crues, plus violentes. Un bon exemple pour apprécier cette différence de traitement est de regarder coup sur coup « l’ Arme fatale » puis sa suite. Force est d’admettre que quelque chose s’est passé entre les deux films.

La musique de Michael Kamen suit cette évolution. Fini les envolées romantiques de John Barry, on est ici dans la droite lignée de ce que le compositeur américain proposait dans « Die Hard ». Une musique sèche et énergique, collant au plus près à l’action.
Dès l’apparition de l’iconique Gunbarrel, le ton est donné. Le son est plus violent, plus brutal avant l’arrivée de l’incontournable thème de la saga.

Ceci n’empêche pas Kamen de briller à nouveau dans l’orchestration des différents morceaux. On remarque notamment un énorme travail sur les harmonisations des instruments à vents.

Cette science de l’arrangement se ressent également sur le magnifique Licence Revoked où les harmonisations de cuivres donnent une vraie richesse au morceau. Section bois et cuivres se passent la main à la volée pour accomplir la mélodie accompagnant la fuite d’un Bond traqué.
Une partie de l’action du film se déroulant dans un pseudo Mexique, la guitare sèche est omniprésente dans le film. Bien que non crédité au générique, c’est à Eric Clapton que nous devons l’enregistrement de l’instrument.

Vous l’aurez compris, le bande originale de « Permis de tuer » est une proposition un peu particulière. Comme beaucoup de scores d’action de Kamen, elle prend son sens surtout avec les images, contrairement aux scores de Barry qui, encore aujourd’hui s’apprécient à l’écoute seule.

L’expérience « Permis de tuer » fût assez amère. En ce qui concerne les États-Unis, les résultats au box office sont décevants. Une partie du public boude le film pour sa noirceur et sa violence. Le film court trop derrière ses modèles au lieu d’assumer d’être un James Bond. Même l’interprétation de Dalton semble perdre en profondeur par rapport au film précédent. Quand à la proposition de Kamen ? Malgré des qualités indéniables, la bande originale de ce nouveau James Bond souffre de la comparaison avec le travail de John Barry. D’autant plus que ce dernier était en état de grâce au moment de composer les musiques de « Tuer n’est pas jouer ».

La suite, vous la connaissez, la MGM entre dans une phase d’imbroglio judiciaire, Timothy Dalton tire sa révérence et le désormais célèbre « troisième Dalton » entre au panthéon des films jamais produits. Nous sommes peut être passés à côté de l’opportunité de voir Michael Kamen revenir pour un score Bond.

Le talent de compositeur de Kamen s’exprimera d’avantage quelques années plus tard quand il composera l’inoubliable bande son du film « Robin des bois, Prince des voleurs » de Kevin Reynolds. (Ainsi que l’exécrable chanson interprétée par Brian Adams. Aux critiques qui lui seront faites plus tard, Kamen répondra que, pour mauvaise que soit la chanson, elle aura eu le mérite de lui payer sa maison).

John Barry ne composera plus jamais pour un James Bond. Après la pause et les ennuis juridiques entre les productions de « Permis de tuer » (1989) et « GoldenEye » (1995), le compositeur se sentira trop vieux pour ces… affaires et passera la main.

Michael Kamen nous a quitté en 2003 des suites d’une sclérose en plaques. Ces bandes originales pour Open Range et la série Brothers in Arms prouvaient que, à 55 ans, le compositeur new-yorkais avait encore énormément de chose à dire.

La bande originales de « Permis de tuer » est écoutable sur les principaux sites de streaming.

Paul Darbot

Paul Darbot

Si vous n'êtes pas intéressé par le sujet, il est probable que ce soit l'une des passions de Paul. Passionné de musique, de cinéma et de l'univers de James Bond, il pourrait vous en parler pendant des heures. Donc, si vous décidez d'aborder ce sujet avec lui, faites-le en connaissance de cause ! Vous pouvez écouter ses compositions musicales sur son site web : https://pauldarbot.com

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