Si la Terre n’était pas suffisante pour 007, le script de Moonraker quant à lui l’était ! Les nombreux détracteurs du film seront ravis d’apprendre qu’ils ont échappé à un film qui devait être à l’origine relativement plus long et contenir des scènes actions ambitieuses qui furent abandonnées avant d’être, pour la plupart, réutilisées dans chacun des « Moore » suivants.
Vous l’aurez compris, aujourd’hui il est temps de se pencher sur le script de Moonraker (1979) !
Moonraker (non daté) :
Le premier script dont nous allons parler pèse 153 pages et est n’est pas daté. Selon la règle générale dans l’industrie du cinéma, une page équivaut à environ une minute à l’écran. Ainsi, si cette version avait été filmée, elle aurait probablement duré deux heures et demie, soit une demi-heure de plus que le film que nous connaissons.
Tout comme The Spy Command (HMSS Weblog), nous possédons ce script. Le nom de Christopher Wood n’est pas inscrit sur la page titre mais nous supposons qu’il en est l’auteur. Tom Mankiewicz avait aussi été associé aux premiers scénarios, ou du moins les esquisses, durant environ trois semaines, mais il n’a pas vraiment été impliqué plus que cela dans le projet Moonraker (voir cette interview) ou plutôt For Your Eyes Only tel qu’étaient intitulés ces premiers scénarios (les navettes spatiales étaient alors nommées Enterprise). Une grande partie du script correspond à ce que l’on retrouve dans le film ; cependant cette version de Moonraker est plus grande, beaucoup plus grande et en fin de compte, trop grosse pour un seul 007 !
Ce script s’ouvre avec un Boeing 747 dans lequel un équipage (entièrement) américain transporte une navette Moonraker. Contrairement au film l’officier de navigation s’appelle Kelly (et non Richard). Un peu plus tard nous retrouvons Bond en mauvaise compagnie dans un autre avion, le pilote détruit les commande en tirant avec un pistolet de détresse (et non un revolver). 007 éjecte le pilote et :
Dans un plan rapproché de derrière lui, nous voyons les mains de Bond saisissant les bords de l’ouverture de la porte d’urgence. Puis une énorme paire de mains arrivent dans le champ de la caméra, touchent le dos de Bond et avec une poussée violente, l’envoient dans l’espace. Maintenant un plan rapproché nous montre notre première vision complète de Requin, son énorme volume remplissant l’ouverture de la porte d’urgence alors qu’il regarde vers le bas, dans la direction où il a envoyé Bond. Il sourit avec une malveillante satisfaction, ses dents d’acier brillantes. Derrière lui les flammes commencent à remplir l’avion.
Après avoir rattrapé le pilote en chute libre et prit son parachute, Bond voit Requin qui arrive près de lui. Contrairement au film le combat aérien entre Bond et Requin est plus court mais cela est compensé par la chute de Requin qui est plus longue :
Maintenant, toujours en chute libre, Bond s’attache dans le harnais du parachute. Il regarde au-dessus de lui et voit Requin en chute libre. Bond tire sur sa corde et son parachute s’ouvre. Alors que sa descente est assurée, Requin passe près de lui.
Alors que Bond dirige son parachute avec expertise, allant vers la sécurité, nous voyons une petite ville américaine en dessous de lui. Dans celle-ci se trouve le chapiteau géant d’un cirque, avec des camions et caravanes garés autour.
Requin, en chute libre, regarde en bas et réalise que le sol n’est qu’à quelques dizaines de mètres. Il tire désespérément sur sa corde mais celle-ci lui reste dans les mains.
S’en suit une longue description d’un numéro de cirque effectué par la famille Marcolini :
Nous voyons, dessous Requin qui tombe, l’étendue ovale du grand toit du cirque, la toile est répandue comme un filet de sécurité géant.
Un public emballé regarde vers le haut du grand chapiteau alors qu’un roulement de tambours s’accumule crescendo. Les Magnifiques Marcolini s’engagent dans leur numéro qui défit la mort sur un câble élevé. Sur le câble, Papa Marcolini en singulet blanc et collants rouges, est en équilibre, tenant une brouette, la roue sur le câble. Dans la brouette se trouve Maman Marcolini, dans un soutien-gorge et une culotte pailletés d’or. La tête en arrière, elle tient horizontalement un long poteau sur son menton incliné. À chaque extrémité du poteau, une chaise tient en équilibre.
Dans une chaise est assit Nino Marcolini, âgé de quinze ans, dans l’autre Nina Marcolini, âgée de seize ans, tous deux vêtus de costumes aux couleurs vives.
Entre ses dents, Papa tient un bâton de 30 centimètres à la fin duquel tient un autre bâton équilibre sur lequel il y a des assiettes qui tournent. Maman, Nino et Nina ont tous des bâtons dans les deux mains et sur leur front, tous avec d’autres assiettes qui tournent. Les trois portent aussi des rouleaux colorés de 1,2 mètre avec leurs pieds.Maintenant, alors que le crescendo des tambours atteint son apogée, Papa Marcolini fait un pas périlleux, puis un autre. L’édifice humain entier avance, les assiettes tournantes, les rouleaux roulants. Le public regarde vers le haut, les yeux écarquillés, le souffle retenu.
Puis, comme un coup de tonnerre avec un grand déchirement de la toile, Requin traverse brusquement le chapiteau. Il atterrit sur le grand câble à quelques centimètres des Marcolini. Le résultat est catastrophique : Requin rebondit en avant, les Marcolini volent dans toutes les directions, les montants du chapiteau lâchent. Le public cri. Dans un chaos de corps, de chaises, de poteaux qui trébuchent, le haut du chapiteau s’enfonce à l’intérieur et recouvre le tout d’un océan de toile.
Du milieu de la masse flottante, deux mains géantes déchirent un bout de la toile. La tête de Requin apparaît à travers le trou. Il regarde autour de lui et lève désespérément les yeux au ciel. [Ses yeux se focalisent sur quelque chose].
Bond vol sereinement sous son parachute. Il regarde vers le bas et sourie.
Générique du début.
Après le générique Bond rencontre M, Q et Frederick Gray. Les dialogues sont similaires au film avec quelques différences ; par exemple lorsque Moneypenny dit à Bond qu’il est en retard, celui-ci lui répond : « Désolé mon vol a été dérouté » alors que dans le film il lui dira : « Je suis tombé d’un avion sans parachute ». Autre petite différence notable dans cette scène : le bracelet de la montre de Bond était censé être en cuir selon le script. Par ailleurs Bond ne tire pas de fléchette dans un tableau mais sur un tableau d’affichage (sans qu’il y ait de remarque de M) :
– Bond : Rappelez-moi de ne pas vous serrer la main.
Enfin à la place de « vous devriez commercialiser cela pour noël », Bond dit : « Merci Q, c’est juste ce que j’ai toujours voulu avoir ».
Bond s’envole à Los Angeles et est, comme dans la novélisation, récupéré à l’aéroport par Trudi Parker (qui sera renommé Corinne Dufour dans le film). En interview, Christopher Wood a déclaré :
J’ai d’abord écrit le rôle de l’actrice Corinne Clery dans Moonraker en tant qu’une insolente poulette californienne et puis, pour des raisons financières, le film a été tourné à Paris avec des équipes et des acteurs français et Clery a eu le rôle. Si j’en avais eu l’occasion, j’aurais réécrit le rôle pour une actrice française. C’est une autre scène qui m’afflige, surtout la terrible ligne « je n’ai jamais appris à lire ». Elle n’est pas de moi.
Dans le script le coté « insolent » et américain de Trudi se retrouvent dès ses premières lignes de dialogues avec Bond :
– Bond : C’est vraiment gentil à M. Drax de vous avoir envoyé pour me prendre, Mlle Parker.
– Trudi : Appelez-moi Trudi. Je vous appelle James. Il n’y a pas de raison d’être formel.[…]
– Trudi : Voici le domaine de Drax.
Elle paraphrase un cliché de Western avec un accent de cowboy :
– Trudi : Aussi loin que les yeux puissent voir, c’est le pays de Drax.
007 aperçoit le château de Drax en fond et s’exclame « Bonté divine ! ». Lorsque leur hélicoptère survole le bâtiment et que Bond voit les astronautes s’entraîner :
– Trudi : Ce sont de jeunes recrues astronautes.
– Bond : Ils ressemblent plus à des candidats de M. et Mme Univers.
– Trudi : M. Drax a choisi la crème physique des spécimens.
Lorsque Bond rencontre Drax, celui-ci est simplement debout devant une fenêtre (alors que dans le film il joue du piano en compagnie de deux jolies filles). Ses deux chiens sont des bergers allemands et non des dobermans (il n’y a pas le passage ou il les nourrit en claquant des doigts). Les dialogues sont similaires au film mais il est a noter qu’à la place de proposer un thé à Bond comme dans le film, Chang entre avec un plateau avec deux boissons et Drax dit à 007 : « Vodka Martini, secoué mais non agité », montrant ainsi qu’il connaît les goûts de son adversaire. La fin de ce premier entretient avec Drax est aussi intéressant :
– Drax : Je dois être franc avec vous, M. Bond. Je commence à avoir peur que tout ne se déroule pas bien avec ma propre organisation.
– Bond : Dans quelle mesure exactement ?
– Drax : Dans chacun de mes centres de travail, des composants ont été égarés. Au début je pensais que ces pertes étaient accidentelles. Désormais je suis sûr que non.
– Bond : Beaucoup de composants ?
– Drax : Trop.
– Bond : Assez pour créer une navette ?
– Drax : C’est très vraisemblable. C’est ce qui m’inquiète. Je pense qu’il y a un traître, M. Bond.
[Trudi entre à ce moment-là et Drax dit qu’elle va l’escorter jusqu’au docteur Goodhead où il pourra lui demander tout ce qu’il veut savoir].
Bond ne coupe Holly lorsqu’elle lui explique que le Moonraker est capable de revenir sur Terre comme un avion de type conventionnel. Après la scène de la centrifugeuse (encore une fois similaire au film), nous arrivons à la scène où Bond séduit Trudi ; celle-ci dit « Quelle mère ? » au lieu de « Je n’ai jamais appris à lire » lorsque Bond lui dit « Et les conseils de votre mère ? ». 007 se réveille plus tard dans la nuit, le script nous dit qu’alors qu’il est juste minuit, la montre de Bond joue les premières mesures de Good Save the Queen avant que Bond n’ouvre les yeux.
Quelques scènes plus loin Bond se rend à Venise, chez Basilica Glassware (et non pas Venini Glass) ; il y a là une indication scénique intéressante : « Les répliques qui suivent de la guide sont inventées et seront remplacées par de vraies informations ». Parmi les œuvres d’art fictives de la guide il y en une en forme de cheval avec son cavalier crée par un certain « Alberto Bellini » et une autre qui a une forme de bol, crée par un certain « Grimalfi the Elder » qui aurait étudié sous la tutelle de « Georgio Agosta ».
Quelques pages plus loin, lorsque Bond et Holly discutent après être sortie du magasin Basilica, le script demandait a ce qu’il y ait des plans d’une personne les observant avec des jumelles depuis le clocher du Campanile.
Arrivé à la poursuite en gondole, le script devient vraiment très intéressant. Celle-ci est plus élaborée dans le script : Bond est dans sa gondole lorsqu’un homme sur bateau-corbillard dans un cercueil tue son rameur (Franco) avec une mitraillette (et non un couteau). Bond appuie sur un bouton qui active un moteur et accélère alors que le bateau-corbillard fait demi-tour, l’homme dans le cercueil et ses collègues mitraillant vers Bond qui a la tête baissée. Bond utilise un microphone situé sous son siège et passe un appel radio en disant :
– Bond : J’appelle la Station 23. Station 23. Je suis poursuivi. Tenez-vous prêt avec J.P. 1.
Bond approche d’un canal avec une jonction en T, le bateau-corbillard toujours à sa poursuite. Il commence à tourner à gauche grâce à sa barre de gouvernail, mais voit presque au dernier moment qu’un bateau ennemi avec un tireur se trouve dans ce canal. Il tourne donc vite à la hâte à droite et est poursuivi par ce nouveau bateau en plus du bateau-corbillard. 007 sort son arme de son holster d’épaule et commence à tirer sur eux alors que des balles s’écrasent près de lui (dans le film Bond n’utilise pas du tout son PPK, hormis dans le gunbarrel). Bond parvient à toucher l’homme dans le cercueil (un des collègues de ce dernier appuie alors sur un bouton qui ferme le cercueil).
Les deux bateaux ennemis poursuivent maintenant la gondole de Bond depuis un canal parallèle ; les yeux de 007 cherchent quelque chose. Puis Bond ralentit et entre dans un hangar à bateaux situé près d’un palazzo. Les deux bateaux ennemis s’arrêtent en face du hangar puis un des sbires de Drax lance une sorte de grenade à l’intérieur qui est suivie par le bruit d’une explosion sourde. De la fumée noire commence à sortir du hangar. À l’intérieur, Bond est apparemment très occupé avec un gros paquet qui ressemble à un parachute…
Les hommes de Drax se tiennent prêts à l’extérieur du hangar, attendant que Bond sorte. D’un coup, James Bond traverse rapidement la fumée, propulsé par un jet pack dans son dos ! Les sbires le regardent la bouche ouverte, trop surpris pour tirer.
Mais attendez, il y a encore mieux !
Soudainement, un hélicoptère sur lequel est monté une mitrailleuse prend 007 en chasse. Bond pilote son jet pack avec expertise, profitant du fait que son véhicule soit plus facile à manier que celui de ses poursuivants. Après plusieurs virages, un tir de l’hélicoptère parvient à atteindre le jet pack et du carburant commence à fuir du réservoir. Bond cherche autour de lui un moyen d’évasion, il plonge et passe sous un pont. Le pilote essaye de redresser l’hélicoptère pour tenter de passer au-dessus du pont (pont que le script précise être une « maquette » pour cette scène) mais trop tard : il fonce droit dessus, faisant ainsi exploser l’aéronef de façon spectaculaire.
Bond essaye de trouver un endroit où atterrir d’urgence : il traverse le toit en verre d’un restaurant de luxe et atterrie entre deux tables. Un serveur court vers lui et 007 se met en position assise :
– Bond : J’ai bien peur de ne pas avoir réservé.
Wooooh ! Et on est qu’à la page 44 du script ! Que nous réserve la suite ?
Dans la scène suivante Bond, s’infiltre de nuit chez Basilica Glassware et découvre le laboratoire. Les choses se déroulent similairement au film, mais après la mort des scientifiques, Chang apparaît soudainement derrière Bond et l’agresse (alors qu’il est toujours dans l’entrée du laboratoire). Pendant un court moment ils se battent ici, Bond trébuchant sur une table qui contient de l’équipement scientifique (une tâche de liquide apparaît sur sa chemise, au niveau de la poche qui contient le tube de liquide mortel qu’il a volé, mais Bond est soulagé de constater qu’il s’agit du liquide inoffensif d’un tube essaie qui se trouvait sur la table sur laquelle il a trébuché).
Bond s’enfuit jusqu’au musée de verre, Chang sort et lance un couteau qui fini dans la porte du musée alors que 007 l’ouvre. Chang entre dans le musée après Bond puis fonce à travers des étagères sur lesquels se trouvent des antiquités en verre pour atteindre Bond. Les deux hommes sur battent et 007 prend l’œuvre en forme de cavalier (dont avait parlé la guide) avant de se raviser pour plutôt prendre un vase qui semble d’une valeur moins inestimable. Chang attrape une épée (l’œuvre en forme de cavalier est alors cassée par l’épée). Le combat se poursuit et à moment Bond se sert d’un bord cassé du vase pour couper la corde d’un chandelier en verre qui tombe sur Chang.
Le combat se déplace dans l’atelier de Basilica Glassware où il y a un énorme four. Chang sort une tige du four dont le bout est chaud et l’envoie vers Bond comme une lance. Elle se stoppe en l’air à quelques centimètres du visage de Bond : une plaque invisible de verre séparait les deux hommes ! Bond va attaquer Chang, à un moment des gouttes d’un chaudron contenant du verre liquide manque de peu de brûler 007.
Puis Bond monte des escaliers et le combat se déplace dans une pièce dans laquelle se trouve des caisses en bois destinées à Rio. Ici les choses se déroulent similairement au film et Chang fini par tomber dans le piano d’un orchestre.
J’ai constamment suggéré que Bond soit mis dans des situations dangereuses réelles, quelque chose avec lequel le public pourrait avoir de l’empathie. Un exemple : dans la scène de verrerie, je voulais que 007 soit attaqué par un tison chauffé à blanc qui finirait dans une chaise rembourrée juste à côté de sa tête. Le rembourrage de cuir et de paille s’allumerait, fondrait, se déchirait, avec des les flammes brûlant le visage de Bond.
– Christopher Wood
Nous retrouvons Holly sur le balcon de son hôtel (qui est le Gritti Palace et non le Danieli) où une main venant de dernière couvre soudainement sa bouche et l’attire dans sa chambre. Bond la soulève et la place sur le lit alors qu’elle se débat. Il lui demande si elle a quelque chose à avoir avec l’attaque de Chang lorsque soudain ses yeux sont attirés par quelque chose : une bouteille et deux flûtes de de champagne.
– Holly : Vous êtes trop suspicieux. Vous avez suggéré un verre, ou vous avez oublié ?
– Bond : Je n’avais pas idée que vous aviez une si bonne mémoire.
[Holly prend son sac à main qui se trouve près du champagne ; Bond l’éloigne adroitement des mains de Holly].
– Holly : (en colère) Que faites-vous ?
[Bond vide le contenu du sac sur la table].
– Bond : Je suis trop suspicieux, vous vous souvenez ?
– Holly : Pensiez vous que j’allais en sortir un pistolet ?
– Bond : Rien de si vulgaire.
Bond analyse un rouge à lèvres : il s’agit d’une sorte de couteau télescopique. Un stylo d’un journal se révèle être une fléchette, le sac se révèle être une radio et le parfum un lance-flamme. Bond sait alors qu’elle est de la CIA et ils décident de s’allier en portant un toast :
– Bond : À la coopération. À tous les niveaux.
[Holly regarde le double lit de sa chambre].
– Holly : Je ne suis pas certaine qu’il soit judicieux que je boive à cela.
[Il pose son verre et celui d’Holly près de lui et l’attire vers lui].
– Bond : Holly, si on ne peut pas se faire confiance entre nous, à qui le peut-on ?
[Ils s’embrassent, la main de Bond fouille discrètement un tiroir : vide. Dans un miroir il voit Holly reprendre son sac à main ; il la stoppe].
– Bond : Tu n’as pas besoin de cela.
– Holly : Une femme est perdue sans son maquillage, James.
– Bond : Je pense que cela pourrait causer ma perte.
Alors qu’ils font l’amour, la caméra était censée s’éloigner vers une fenêtre pour montrer le canal avec un bateau qui transporte un piano avec Chang dedans… Le lendemain, Bond, M et Frederick Gray entrent dans le laboratoire avec des masques à gaz, mais il ne reste rien du laboratoire et Drax est là. Contrairement au film, Bond ne cache pas à Gray son intention d’aller à Rio :
– Gray : Je n’ai jamais été aussi humilié de ma vie. Votre homme devrait voir un spécialiste, M.
[Bond demande une analyse de la substance qu’il a récupérée au laboratoire].
– Gray : Et qu’est ce que vous allez faire ?
– Bond : Allez à Rio, comme convenu. [Il fait un méchant signe de tête à Gray] Bonne journée messieurs.
Une fois son avion Concorde posé à Rio, Bond se fait conduire en Rolls à l’ambassade britannique (et non à un hôtel ; il n’est pas suivi). Il y rencontre un diplomate nommé Sir Giles Bentley qui lui présente un certain Miguel Santa :
– Sir Giles : Permettez moi de vous présenter Miguel Santa, qui sera à votre disposition pendant que vous serez avec nous.
Bond demande à Miguel si les initiales C & W lui disent quelque chose ; il lui répond que ce sont celle d’un importateur. (Dans le film le personnage de Miguel Santa sera ultimement changé en une femme, Manuela, mais son rôle reste sensiblement le même). Bond et Miguel se rendent à l’entrepôt de C & W durant le Carnaval de Rio, ignorant que Requin se trouve dans la foule sous un masque de Frankenstein. Le script nous dit qu’un garçon d’environs 9 ans regarde Frankenstein-Requin en rigolant, puisRequin retire se masque devant lui en souriant : l’expression de l’enfant change, il crie de terreur et s’enfuit. On nous dit que Requin est « bouleversé » (upset) par cela.
Bond s’introduit dans l’entrepôt tandis que Miguel fait le guet à l’extérieur. Requin va attaquer Miguel qui sort un couteau, Requin le désarme et s’apprête à le tuer lorsque des gens arrivent dans la ruelle ; Requin fait alors semblant de danser avec lui. Mais une fois les gens partis, Requin pousse Miguel contre une grille et se prépare à le mordre… Lorsque Bond sort de l’entrepôt il voit le bras de Miguel à travers les barreaux, comme si un doigt pointait vers lui. Bond s’agenouille près de corps de Miguel et voit du sang : il est mort. Requin n’est vraisemblablement plus là. (À noter que dans le film, Requin ne tue absolument personne).
Après cela Bond prend le téléphérique pour le Pain de Sucre. Au sommet observe les avions de Drax décoller (cela aura de l’importance pour plus tard) et tombe sur Holly. Ils décident de faire équipe et prennent un téléphérique pour redescendre :
– Holly : Magnifique vue.
– Bond : Pas d’où je me tiens.
[Elle suit le regard de Bond : ils voient Requin près de la station des téléphériques].
– Holly : Vous le connaissez ?
– Bond : Pas socialement. Son nom est Requin. Il tue des gens.
– Holly : Que peut-il faire ?
– Bond : Il pense à quelque chose.
Comme dans le film Requin bloque une grosse roue avec ses mains et coupe un câble avec ses dents. Il les rejoint avec un autre téléphérique et un combat s’engage. Bond et Holly finissent par s’enfuir en glissant sur le câble à l’aide d’une chaîne, Requin en téléphérique non-loin derrière. La principale différence avec le film c’est qu’il n’y a pas de Dolly après que Requin et son téléphérique se soient crashés. (Pour la petite anecdote ce personnage n’a pas été inventé par Christopher Wood qui détestait cette idée).
Bond et Holly sont sains et sauf mais se font assommer par un sbire. Le script ne les fait pas se réveiller dans une ambulance, mais dans un luxueux yacht appartenant à Drax. À côté d’eux se trouve Requin et Drax est en train de manger un petit déjeuner anglais à une table un peu loin. 007 rencontre donc le méchant à nouveau :
– Drax : Ah, M. Bond ! Je vois que vous êtes enfin avec nous ! La pauvre docteur Goodhead était très inquiète à votre sujet… J’allais justement profiter de la seule contribution indiscutable de votre pays à la civilisation occidentale, le petit déjeuner anglais.
Un serviteur apporte deux œufs à la coque à Drax. Le méchant prend une cuillère à œufs dans une main, un couteau dans l’autre. Il regarde Bond, en souriant d’un air moqueur :
– Drax : Dites-moi, vous tapotez ou coupez ?
– Bond : Cela dépend contre qui je me bats.
[Drax lâche la cuillère].
– Drax : Je coupe.
[En un mouvement rapide il coupe le haut de l’œuf].
– Drax : Et c’est ce que je vais faire avec vous et à votre compagnonne dévouée, mon cher Bond. Couper.
Par « couper », Drax entend qu’il va attacher Bond et Holly avant de tracter le long du récif de corail avec son yacht :
– Drax : (en mangeant et buvant) Est-ce que je vous aie intrigué ? Alors laissez-moi vous expliquer. Quand, bientôt, ce navire voguera, vous serez tous deux attachés à une longue corde et tirés derrière nous. Là-bas il y a un récif de corail, le seul passage qui traverse entre est étroit. Le bateau passera par ce passage mais pas vous… Pourquoi pas, vous vous demandez ? [Il fait signe vers un paravane]. Vous savez ce que c’est ? [Bond fronce les sourcils]. Je vois que oui. Un paravane, docteur. Utilisé pour pêcher en haute mer. Ce va vous tirer, non pas directement derrière le bateau, mais à un certain angle de celui-ci. Le bateau passera dans le passage entre le récif de corail, mais vous serez tirés à travers. Votre chair sera arrachée de vos os. Au-delà du récif il y a des requins. Votre sang va les attirer. Ils vont venir par centaine. Vous serez tirés jusqu’à ce qu’il ne reste rien à part une fin de corde, effilochée et ensanglantée.
– Bond : Vous êtes détraqué, Drax.
– Drax : Pas autant détraqué que vous allez l’être, M. Bond.
Cette séquence, imaginée par Fleming dans le roman Vivre et laisser mourir (puis reprise dans le comics-strip The Golden Ghost), sera réutilisée dans le film Rien que pour vos yeux avec quelques petites différences…
En effet, Drax a aussi envoyé Requin à l’hôtel de 007 pour qu’il récupère les affaires de Bond ; celles-ci incluent une valise en cuir. Un cadran avec une ligne de chiffres se trouve sur le côté de cette valise. Drax demande à Bond de l’ouvrir et il s’exécute : il bouge les chiffres, des loquets, et le clic d’ouverture se fait entendre. Après un mouvement rapide, Bond bouge à nouveau les chiffres et ouvre la valise en grand. Drax demande à Requin de vider son contenu (qui inclut un Walther PPK, un fourreau à couteau et le passeport de Bond) par-dessus bord, puis la valise est posée hors de sa vue. Le script demande un gros plan de cette valise à la Bons baisers de Russie : les chiffres du cadran changent de seconde en seconde et sont maintenant à 29.35. Drax quitte le yacht :
– Drax : Et maintenant, avec regret, j’ai d’autres affaires plus importantes qui m’attendent. Je laisse votre mort à de plus gros estomacs et de plus petite imaginations. Adieu à vous deux, et bon voyage.
Drax descend du yacht et monte dans une limousine, puis son équipage prépare Bond et Holly (Requin retire la montre de Bond).
– Holly : Avons-nous la moindre chance ?
– Bond : Une chance ? Oui. Le temps nous le dira.
Le bateau commence à trainer Holly et Bond et ce dernier se débat pour sortir la tête d’Holly hors de l’eau. Pendant ce temps, sur le yacht, Requin remarque que l’un des sbires regarde la valise de 007 avec intérêt. Avec grognement de colère, Requin attrape la valise des mains du sbire et « caresse sentimentalement sa surface » ; il ne remarque pas les chiffres sur le cadran qui sont maintenant à 04.28. Le yacht passe dans l’étroit passage et Bond et Holly continuent leur trajet à travers le corail, 007 se tordant pour absorber les pires impacts. Il grimace lorsqu’il se cogne contre des arêtes tranchantes du corail. Des requins les suivent. Le yacht a passé le récif de corail et se dirige vers le large.
Finalement, Requin regarde le cadran de la valise qui est à 0.07 (007) et puis remarque les chiffres qui changent maintenant de 0.06 à 0.05, 0.04. Il regarde le cadran avec une suspicion croissante puis se lève, tenant la valise par la poignée, se préparant à la jeter par-dessus bord. Le yacht explose violemment jusqu’à sa désintégration totale ! Des fragments de bois et métal retombent dans l’eau pendant que Bond ramène Holly, désormais inconsciente, vers un morceau de l’épave avant de pousser avec ses jambes en direction du rivage.
Requin ? Il est tout proche, assis à califourchon sur un morceau de bois, tenant toujours la poignée de la valise. De la résignation lasse se voit dans son regard. Des requins dévorent le sbire qui inspectait la valise et Requin s’éloigne en ramant. Pendant ce temps Bond et Holly atteignent une plage tropicale, on peut voir du sang dans le dos de 007 comme s’il s’était fait fouetter. Il détachent leurs liens en disant : « J’avais entendu parler du bondage, mais c’est ridicule ». Holly lui demande ce qu’il s’est passé :
– Bond : Explosif plastic dans la doublure de ma valise. Fermez-la de la mauvaise manière et elle explose. Je l’ai programmé avant que l’ont prennent la mer. Je vous avais dit que le temps nous le dirait.
– Holly : Comment saviez-vous sur quel temps il fallait la régler ?
– Bond : Je ne savais pas. J’ai supposé trente minutes.
– Holly : Et comment vous aviez raison… Comment vous avez toujours raison.
Elle s’allonge sur le dos, l’attirant près d’elle puis l’embrasse passionnément.
Nous sommes désormais sur une route qui se trouve au milieu d’énormes prairies. 007 et Holly attendent Q qui finit par se montrer avec un assistant. Celui-ci arrive dans un véhicule qui remorque un box à chevaux sur lequel on peut lire Pegasus Riding Stables. À l’intérieur, il y a deux mini-jets à la Octopussy (un rouge et un blanc) !
– Q : Bien, je vous ai apporté vos montures. Vous feriez mieux d’être extrêmement prudent avec elles.
Après avoir assemblé ce « couple de pur-sang » (selon Q), Bond s’installe dans le jet rouge et Holly dans le blanc. Après un dernier « Prenez soin de l’équipement », Q lève son pouce et ils décollent. En l’air, Bond demande par radio : « Holly, pensez-vous que vous pouvez gérer l’un de ces trucs ? ». « Je pense que oui, James », elle manœuvre son jet et le fait voler à l’envers en se plaçant parallèlement à l’avion de Bond. Le script précise que Bond est bouche bée et qu’elle lui fait un geste joyeux de la main. On entend Q à la radio qui leur dit anxieusement de se rappeler ce qu’il a dit (à propos d’en prendre soin)…
James Bond fait alors plonger son avion vers le box à chevaux où se trouve Q, les deux avions « touchent presque le toit du box, Q plonge à terre, la tête contre le sol ».
Peu de temps après, les deux agents sont sur la trace d’un avion de transport de Drax. Ils le suivent au radar pour savoir où il se rend. Le script demande un plan d’un indien dans une pirogue en train de pêcher dans la jungle plus bas alors que les deux mini-jets passent l’un à côté de l’autre au-dessus de lui. Soudain trois autres points apparaissent sur le radar :
– Holly : James, quelque chose arrive rapidement !
Ils regardent dans leurs rétroviseurs et voient trois gros jets envoyés par Drax qui sont en formation triangulaire derrière eux ; un duel aérien s’engage. Bond commence par faire un looping, poursuivi par un des avions. Holly rejoint Bond, ils volent parallèlement. Deux avions de Drax ouvrent le feu sur eux, Bond et Holly plongent puis remontent et change soudainement de direction « dans une terrifiante manœuvre en ciseaux, ils se croisent l’un l’autre, évitant apparemment la collision à quelques centimètres près ». Les deux avions à leurs trousses les suivent instinctivement mais finissent par se crasher l’un dans l’autre avec une explosion.
Alors que Bond et Holly montent abruptement à la verticale, ils remuent (waggle) leurs ailes « dans un geste de triomphe ». Le troisième avion de Drax se met à la poursuite de Holly et parvient à la mitrailler, de la fumée sort de l’avion de Holly qui chute en spiral ; elle parvient à le stabiliser pour se poser au milieu d’un lac. L’avion commence à couler et le destin de Holly reste inconnu pour le moment.
L’avion de Drax ouvre maintenant le feu en direction de celui de Bond. 007 plonge maintenant dans une gorge, le jet toujours à sa poursuite. Ils suivent le cours de la gorge, dans cet environnement Bond à l’avantage car son aéronef est plus maniable que celui de son adversaire. La gorge se rétrécit brusquement, de sorte que l’espace entre les hautes falaises mesure moins d’une longueur d’aile de mini-jet. Bond incline son avion à 90°, de manière à ce que les ailes soient à la verticale, et parvient à passer dans l’espace réduit. L’avion de son poursuivant n’est pas aussi chanceux, ses deux ailes sont arrachées, il se crashe et explose violemment.
Bond n’est pas sorti d’affaire pour autant, sa jauge de carburant indique maintenant zéro et le moteur toussote. Il parvient cependant à faire atterrir le mini-jet sur une route de campagne. Un camion arrive cependant en face de lui sur la route et Bond tourne alors de justesse vers une station-service devant laquelle il se gare. « Ordinaire ou super ? », lui demande le pompiste.
Après cela, Bond rejoint Q, M et Moneypenny dans un ranch du MI6 (et non un monastère) à cheval sous la musique de Les Sept Mercenaires (The Magnificent Seven). La scène est similaire au film bien qu’une petite différence mineure existe : on nous dit que l’endroit où Holly a atterri est une zone dans laquelle peut être trouvée l’orchidée rare qui est la base de la substance mortelle de Drax.
Dans la scène suivante Bond se rend dans le coin avec un bateau gadgétisé que le script nomme le « Q-craft ». Il arrive près le l’épave de l’avion de Holly lorsque l’on ouvre le feu sur lui et une course-poursuite en bateau commence (Requin n’est toutefois pas présent). Au final 007 doit sortir d’urgence du bateau et le fait grâce à un deltaplane. Celui-ci se crashe dans l’eau et disparait de vue du spectateur. Le deltaplane est aspiré par un tourbillon mais Bond est en sécurité. Il aperçoit une belle blonde habillée d’un « étrange costume exotique, longue jupe fendue avec un manteau en coton blanc qui enveloppe ses seins et ses mains. Elle se tient là, visible à travers l’arc-en-ciel du torrent d’eau, ne regardant pas Bond, mais à travers la gorge ».
Finalement, 007 rattrape un peu plus tard la jolie blonde, qui est se trouve désormais aux côtés de deux servantes et arrive à la base secrète de Drax. Bond flirte un peu plus que dans le que le film : « Je suppose qu’une vodka-martini serait hors de question ? », la beauté blonde lui fait un « ravissant sourire » comme seule réponse. Celle-ci et les deux servantes le conduisent à une piscine. Des vêtements propres sont disposés de l’autre côté. Des servantes supplémentaires font leur apparition avec du vin et des plateaux contenant des poulets rôtis et des fruits exotiques. La beauté blonde fait un geste vers la piscine et la nourriture.
D’un air fatigué, Bond enlève ses vêtements mouillés et déchirés, et se glisse dans la piscine. Le script appelle à un plan d’une orchidée qu’une fille lance dans l’eau. Bien entendu le moment de détente est de courte durée. Comme dans le film, un anaconda géant fait son apparition. Bond se bat contre l’animal, il attrape une broche d’un plateau de nourriture pour le coincer dans la gueule de l’anaconda. Finalement 007 se débarrasse de la bête en le faisant aspirer dans une soupape de vidange de la piscine :
[Bond ouvre accidentellement la soupape avec ses pieds]. Un torrent d’eau passe à travers, aspirant la queue du serpent. Bond, tiré sous l’eau, voit cela et force la valve à s’ouvrir d’avantage. Le serpent est lentement mais surement aspiré dans le drain. Sa tête disparaît.
Bond est capturé (on nous dit au passage que la couleur des uniformes des techniciens de Drax est blanche – et non jaune) et il y a là un dialogue intéressant :
– Bond : Sur quoi diable êtes vous en train de travailler, Drax ?
– Drax : C’est une convention dans les fictions qu’aiment les femmes de chambre que le vilain explique tout avant de se débarrasser de ses victimes. Je n’ai pas l’intention de faire de même.
– Bond : Pas même un simple éclaircissement, Drax ? Sur ces orchidée.
Et plus tard :
– Bond : Où ces navettes se rendent-elles, Drax ?
– Drax : Vous m’avez assez distrait.
Il n’est également jamais expliqué pourquoi Drax a fait voler sa propre navette. Ce qui suit est assez similaire au film : Holly et Bond sont placés dans une pièce située sous un Moonraker et il y a là une petite différence :
– Holly : Pouvons-nous escalader ?
Alors qu’elle parle, un cercle de pointe en acier dirigé le bas sort des murs, les empêchant de s’échapper [par le haut].
Bond et Holly s’en sortent grâce à la montre de Bond et embarquent aux commandes d’un Moonraker qui rejoint la station spatiale de Drax. L’amarrage à la station est beaucoup plus complexe que dans le film : à l’approche de la station (qui ressemble à un gros globe sans branches) les six Moonraker ouvrent les portes d’une soute de laquelle sort une espèce de grue :
Nous avons désormais une vision générale de l’ensemble de l’opération. Les six Moonrakers ont tous leurs trappes ouvertes. Divers composants sont sortis et montés ensemble. Certains se déroulent, d’autres s’étendent. Les bras de grue articulés, manipulés avec compétence par leurs opérateurs, […] atteignent, saisissent avec des griffes en acier, coupent et soudent avec des rayons laser, assemblent, serrent des choses ensemble. L’une des navettes coupe les composants avec un rayon laser qui sort de son nez.
Comme nous le voyons, la station spatiale de Drax prend forme. Le grand globe central, a maintenant été étendu par six bras tubulaires transparents avec, à chaque extrémité, un globe satellite. […] Tout le complexe rappelle la forme du logo de l’entreprise de Drax.
Le discours de Drax est beaucoup plus court (il n’y a pas la partie qui fait égocentrique) et lorsque Holly et Bond cherchent le centre de brouillage radar, ils tombent sur une Love Chamber, (voir notre dossier sur les scènes coupées) où des astronautes de la station s’attèlent à la création d’une nouvelle race :
Du point de vue de Bond et Holly, nous voyons, dans la sphère de gravité zéro, un certain nombre de jeunes hommes et de jeunes filles jolies, en collant, lévitant alors qu’ils effectuent de la callisthénie et des positions de yoga méditatives. Au premier plan, une belle fille […] Bond la regarde avec intérêt. Holly s’éloigne. Bond, après avoir jeter un dernier regard à la belle fille avec regret, suit et rejoint Holly qui s’est arrêté à une autre fenêtre interne le long de la galerie.
Du point de vue de Bond et Holly nous voyons une autre chambre circulaire. Elle brille avec une lumière étrange et éthérée, qui vibre comme un battement de cœur humain. Dans globe, flottant dans l’espace, il y a deux amoureux. La jeune femme semble être nue sous un vêtement diaphane blanc qui se gonfle d’érotisme alors qu’elle et son partenaire, aussi apparemment nu, bougent dans un ballet d’accouplement sensuel. Les rayures de la robe de la fille bougent comme une vague lente, leurs doigts se touchent, ils s’embrassent, les doigts de la fille s’étendent en extase.
– Bond : (sèchement) Quelqu’un prend le discours de Drax très à cœur.
Après que Bond et Holly aient détruit le matériel de brouillage radar, la station spatiale est maintenant visible depuis les stations radars de la Terre. Les Américains contactent l’Union soviétique. Cependant ce n’est pas le général Gogol qui prend l’appel, mais un certain général Kuchinsky (mêmes dialogues que dans le film).
Bond et Holly finissent par se faire capturer mais les renforts arrivent. Le script précise que les Américains portent des combinaisons spatiales blanches tandis que les hommes de Drax portent des combinaisons noires (et non jaunes). Certains hommes de Drax possèdent également des véhicules spatiaux une place sur lesquels sont montés des lasers.
Drax ordonne à Requin d’éjecter Bond et Holly dans l’espace via un sas, mais de la manière que le film (sans qu’il n’y ait de Dolly toutefois), Requin rejoint le camp des alliées. Curieusement Drax est directement tué dans cette même scène (avant même que les Américains n’entrent dans la station spatiale) :
Alors que les gardes [frappés par Requin] s’effondrent, déposant leurs armes, Drax s’avance, étonné, momentanément hors de sa garde. Tout de suite Bond le frappe à la mâchoire, le poussant directement dans le sas. Holly saisit le levier, le tire et la première porte du sas glisse en position. À l’intérieur du sas Drax se relève, son visage tordu de rage, les insultant tous. Mais rien ne peut être entendu – le sas est insonorisé. Avec un petit sourire sombre, Bond se tourne vers le second levier. Mais avant qu’il ne puisse le saisir, Requin met don énorme main dessus et déplace doucement celle de Bond de côté. Puis il saisit le levier et, avec un regard de dégoût envers Drax, le tire.
Drax, son visage maintenant rempli d’horreur, est éjecté du sas […] dans l’espace. Bond et Holly sont debout face à Requin : ses dents d’acier brillent alors qu’un grand sourire de bonne volonté se répand sur son visage.
Les Américains arrivent à l’intérieur de la station, se débarrassent de la résistance, et le général Scott tombe sur eux et dit : « Docteur Goodhead ! Bond ! Comment est-ce… ? ». Cette ligne de dialogue suggérait donc que le Scott et Bond se connaissent…
La station spatiale est sur le point de se désintégrer et Bond et Holly montent dans la navette de Drax pour détruire les sphères de gaz. Comme dans le film Requin aide à désarrimer leur Moonraker et puis nous pouvons lire :
Requin se tient à la fenêtre. À côté de lui se trouve une grande rousse. […] Du point de vue Bond et Holly nous voyons Requin et la rousse à la fenêtre. Requin leur fait un signe de paix.
Les dernières pages sont très similaires au film (au détail près qu’il n’y a pas la ligne de dialogue : « Le Colonel Scott rapporte avoir récupéré deux survivants : un grand gars et une petite blonde » ; on ne sait donc pas ce qu’il est advenu de Requin et de la rousse).
Alors que faire de tout cela ? Eh bien, faire un film avec ces 153 pages de script aurait été une entreprise colossale et aurait creusé sensiblement le budget. Sans aucun doute, cela aurait été un best-of des cascades de James Bond, que ce soit sur terre, dans les airs, sur l’eau et même dans l’espace ! Une sacrée épopée ambitieuse, si grande qu’un seul film de James Bond ne suffisait pas à placer toutes ces scènes d’action, qui furent réutilisées par la suite…
[divider][/divider]Moonraker (19 mai 1978) :
Nous possédons aussi un autre script de Moonraker de 150 pages. La date visible sur l’entête est le 19 mai 1978 mais en réalité il possède des pages révisées datant du 20 juin, 1 août, 3 août, 29 août, 14 août, 22 août, 29 août, et du 21 novembre 1978. (C’est de ce script que provient l’extrait visible sur la bannière de cet article).
Il s’agit d’un script qui est beaucoup plus proche du film que celui précédemment étudié (il n’y a notamment pas de séquence en jet pack, ni de tractage en bateau, ni de mini-jets), toutefois il y a quelques différences intéressantes. Durant la scène du Boeing 747 transportant le Moonraker, il est précisé qu’un des membres de l’équipage porte un uniforme de la R.A.F. et les autres celui de la NASA (ils ne sont donc plus tous américains).
Les choses deviennent plus intéressantes lorsque Bond s’envole à Los Angeles, où il est récupéré à l’aéroport non plus par Trudi Parker mais par une certaine Sylvie Dufour (qui sera renommée Corinne Dufour dans le film, peut-être en honneur de l’actrice « Corinne » Cléry). Lorsque 007 se réveille plus tard près d’elle, le script dit : « alors qu’il est juste minuit, la montre de Bond joue les premières mesures de Rule Britannia et Bond ouvre les yeux » (ce n’est donc plus God Save the Queen).
Quelques pages plus loin, lorsque Bond et Holly discutent après être sortie du magasin Venini, le script demandait aussi a ce qu’il y ait des plans d’une personne les observant avec des jumelles (mais cette fois depuis le Merceria et non plus depuis le Campanile). Bond fini par monter dans sa gondole lorsqu’un homme sur bateau-corbillard tue son rameur avec un couteau. Bond appuie sur un bouton et la gondole se transforme ; il tue l’homme aux couteaux avec son pistolet. Le reste de la poursuite est similaire au film, y compris Bond qui parcourt la place St. Mark sur le coussin gonflable de sa gondole.
Arrivé à Rio, Bond est suivi par Manuella. Il ordonne à son chauffeur de tourner à droite, mais contrairement au film elle le suit toujours :
La Rolls approche d’une intersection bondée. Un tram arrive et commence à traverser l’intersection. Celui-ci est rempli de passagers habillés avec des vêtements colorés et accrochés aux côtés du tram. La Rolls coupe la route du tram et disparaît alors que celui-ci continu son chemin.
Manuela, dans sa voiture de sport, est forcée de s’arrêter, elle perd temporairement de vue la Rolls. Aussitôt le tram passé, elle accélère.
Le tram continue son chemin alors que Bond se tient parmi ses passagers.
Plus loin, durant le combat sur le téléphérique, une autre différence est à noter : Holly utilise son parfum lance-flammes sur Requin (celui-ci tombe alors arrière dans la trappe qui mène à l’intérieur de la cabine du téléphérique). Puis Requin rencontre Dolly (décrite seulement comme « elle est petite, environ 1 mètre 50, et jolie ») et il y a un étrange dialogue :
– Dolly : Mon nom est Dolly.
– Requin : Ga-Ga, Gaga.
Un sous-titre dit « Bonjour, Dolly ».
Plus tard, dans la station station spatiale de Drax, Bond et Holly désactivent le système de brouillage radar. Les Américains s’entretiennent alors avec le Général Gogol et il y a là un cameo d’un personnage de L’espion qui m’aimait lorsque leur conversation se termine :
Gogol sourie en raccrochant le téléphone. La caméra révèle alors une magnifique brunette fumant une cigarette dans le lit à côté de lui. Nous la connaissons sous le nom de Anya Amasova.
Le script précise que les astronautes de Drax portent des combinaisons couleur « ocre », Bond essaye aussi de faire monter Requin et Dolly avec lui et Holly dans le Moonraker 5 mais les portes de la navette sont bloqués (Requin ne dit pas « À nous » après avoir débouché le champagne dans le script).
[divider][/divider]D’autres scripts du film présentaient également des idées qui furent redéveloppées dans les films suivants, comme la séquence de la tour Eiffel de Dangereusement Vôtre. L’Inde (Octopussy), a aussi été considérée comme un lieu de tournage potentiel.
Retrouvez plus de scripts et autres éléments méconnus sur notre page Orbis Non Sufficit !
Commenter